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Lorsque vous êtes en mesure de faire s'enflammer vos rideaux par un simple regard, cela n'est jamais bon signe. Pas plus que de faire des rêves prémonitoires, ou des cauchemars devrai-je plutôt dire. Jusqu'alors, ces cauchemars n'avaient fait que m'empêcher de trouver le sommeil réparateur dont je rêvai. Et puis un jour, l'un d'entre eux s'était réalisé. Le temps passa et d'autres signes de mon potentiel sorcier apparurent. J'étais terrifiée, autant par mes dons que par ce qu'il adviendrait de moi si quelqu'un venait à apprendre ma vraie nature. Instinctivement, je me suis donc tournée vers Gaius, persuadée qu'il me viendrait en aide, lui qui me connaissait et soignait mes mots depuis tant d'années que je le considérai comme une personne de confiance. Mais il n'en fit rien. Et à ma plus grande surprise, ce fut Merlin qui me vint en aide. Disant savoir comment m'aider, il m'emmena à la rencontre des druides. Eux seuls pouvaient m'aider à accepter mes dons disait-il. Et il avait raison.

Merlin et moi sommes partis en douce durant la nuit, le chemin était long et personne ne devait être au courant de notre escapade. Les druides m'accueillirent à bras ouverts, comme si j'étais des leurs. Pour la première fois, je fus acceptée sans être jugée, et je vis enfin mes dons comme un cadeau et non un fardeau. Hélas, il nous fallait rentrer, Merlin et moi. J'étais la pupille du roi et mon absence ne pouvait donc passer inaperçu. C'est à contre coeur que j'ai quitté les druides qui m'avaient ouvert les yeux, et alors que nous rentrions, je pris conscience, enfin, de qui j'étais.

Nous étions donc sur le chemin du retour quand, regardant les oiseaux s'envoler de la cime des arbres, je compris que je ne devais plus avoir peur, et qu'Uther ne devait pas être un obstacle au développement de mes dons, à l'épanouissement de mes capacités magiques. En cet instant d'ailleurs, je me surpris à détester plus que jamais celui qui avait autrefois fait le serment à mon père de me protéger, et me mis à rire intérieurement de cette promesse qui ne manquerait pas d'être brisée si je ne me montrai pas prudente devant lui. J'avançai désormais un peu plus sereine et avec une plus grande confiance en moi. Les druides m'avaient expliqué que la magie pouvait être utilisée à bon escient, qu'ils pouvaient et devaient faire le bien. Rêvassant en regardant un papillon se poser sur une branche, les oiseaux s'envolaient par dizaines, les gardes de Camelot arrivaient à grandes enjambées épées en mains et le papillon s'envola au loin, non sans faire plusieurs pirouettes avant de disparaître.

Attendez, des gardes qui arrivaient épées en mains ? Uther et Arthur s'étaient aperçus de mon absence, et étant partis en douce, ils ont cru à mon enlèvement. Nous nous sommes cachés derrière les fourrés, et une fois les gardes partis, nous avons repris notre route. Nous ne pouvions prendre le risque d'être surpris tous deux nous baladant dans la forêt, alors que le tocsin sonnait sans doute encore ma disparition, nous aurions été suspectés de quelque trafique que ce soit, et Merlin aurait payé à ma place. Et soudain j'y pensai. Si j'en étais arrivée là, à ne plus redouter mes facultés magiques, c'était grâce à lui, lui qui était si bon et avait un coeur si pur, lui qui veillait sur tout le monde sans attendre aucun remerciements en retour. Accepter mes dons m'avait permis d'enfin voir le monde et ceux qui m'entouraient tels qu'ils étaient. Alors écoutant les pas des gardes s’étouffer au loin, je m'arrêtai et me tournai vers Merlin.

« Tu as été d'un grand secours pour moi aujourd'hui Merlin, et je t'en remercie. Si je peux surmonter ma peur d'Uther quant à ma nature et ce qu'il pourrait me faire s'il l'apprenait, et accepter la magie qui est en moi, c'est bien grâce à toi. Tu es un vrai ami, je te suis à jamais redevable. » lui ai-je alors dit en le serrant dans mes bras, les yeux embués de larmes.

Beaucoup d'émotions se bousculaient en moi à cet instant, et il me fallait un peu de temps afin de pouvoir faire le point sur cette expérience. On dit que le changement se fait lentement, avec les années. Que les gens évoluent pas à pas. Mais tout cela est faux. Le changement s'effectue en une seconde, en un claquement de doigts. Et il m'avait suffit d'une seconde pour que le changement s'opère en moi, mais désormais je sais qui je suis. Je suis dame Morgane, pupille du roi Uther Pendragon, mais tout cela n'est que détail. Je suis Morgane, une jeune prophétesse résolue à canaliser ses pouvoirs magiques et à s'en servir à bon escient.

L'embrassade terminée, je me remis à marcher en direction de Camelot..« Rentrons vite, et tâchons de trouver des excuses plus que valables à servir à Uther, surtout toi si tu ne veux pas manger des fruits pourris une fois encore. » ai-je continué en un léger rire.